Art/Graphic Director, touche-à-tout passionné par la communication et de la création graphique sous toutes ses formes, je m'installe à Paris en 2009. Je travaille dans les univers de la beauté (cosmétique, parfumerie, bijouterie), mais pas que… Art/Graphic Director, je réalise pour des particuliers et des entreprises des identités visuelles, des éléments de communication, des photoshoot et du conseil avec leur déploiement à 360°. Parallèlement à ça, j'occupe mon temps entre la peinture, l'écriture et surtout la photographie.

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panayotis pascot spectacle Presque

Par où commencer…

Panayotis Pascot, je l’ai connu comme tout le monde, dans le Petit Journal. Je découvrais étonné ce jeune homme qui montrait déjà mille fois plus d’assurance que moi, alors qu’il n’avait que 17 ans. À un mois et un jour près, nous avions pile 10 ans d’écart (et c’est toujours le cas).

Il me m’était mal à l’aise

Je me souviens bien de cette découverte, car j’ai une sorte de réflexe étrange depuis toujours : quand quelque chose me met mal à l’aise, je zappe. Et pour une raison ou un autre (ici j’ai effacé une suite de paragraphes où j’essayais d’expliquer maladroitement ce qui me met mal à l’aise : je vous épargne ça, surtout que ce n’est pas clair, même pour moi), les chroniques de Panayotis dans Le Petit Journal puis dans Quotidien, où il jouait le candide un peu gauche et volontairement idiot, ne m’amuse pas et me mettent mal à l’aise. Je zappais donc.

J’emportais avec moi l’image de ce jeune homme, un peu jaloux de son audace. C’est aussi, sans doute, pour ça que je zappais.
Car si je suis un grand timide, je travaille sur moi depuis longtemps. Parler à des inconnus ne me dérange plus et je suis bavard… à condition de me retrouver au pied du mur. Sinon, les inconnus, je ne leur parle pas et je les évite. Et de manière générale, si vous voulez entendre le son de ma voix, voyez-moi en petit comité, car plus il y a de monde, moins je prends de place.

À un mois et un jour près, j’ai pile dix ans de plus que lui, et j’en suis encore là.

C’est dans ce contexte, je redécouvrais Panayotis, devenu barbu.

Le retour et l’envie de découvrir le spectacle

Panayotis, je l’ai vu quelques fois sur des plateaux télé. Il n’était plus le jeune chien fou que je trouvais gênant, même s’il semblait toujours tenir une sorte de rôle. Dans les dernières, il était là pour faire la promotion de son premier seul en scène, “Presque”.

Ça ne me tentait, pas, mais alors, pas du tout. Je le voyais comme un énième spectacle d’un Norman, une suite de blagues sans grand intérêt (par rapport à ce que j’aime).

Puis il y a eu cette vidéo avec Marina Foïs pour son passage à l’Opéra suivi par sa vidéo avec sa grand-mère, annonçant l’arrivée de la captation de son seul en scène sur Netflix. Et je dois dire, que l’humour employé dans ces deux vidéos, fit mouche et piqua ma curiosité.

Il a désormais 24 ans, à un mois et un jour près, j’ai pile 5 ans de plus que lui, et j’ai envie de voir son spectacle.

Un spectacle touchant

J’aurais aussi pu titrer “drôle“, “bienveillant“, “brillant“, “subtil“, “intimiste” ou “intelligent“. J’ai hésité. J’ai opté pour “touchant“, parce que c’est le sentiment qui l’emporte après le visionnage.

Le déroulé : Cette fille, le fil rouge

Le spectacle commence par une anecdote. Très vite, Panayotis nous parle de Cette fille, dont il était très amoureux. Il sera question de sa relation avec elle tout le long du spectacle. Il use d’anecdotes qui s’imbriquent les unes dans les autres pour en expliquer les tenants et aboutissants. Pourquoi agit-il comme ça ? Comment en est-il arrivé là ? Il remonte le fil de sa vie et de ses expériences avec humour et bienveillance, racontant sa famille et ses amis. Même si on ne s’en rend pas forcément compte au début, il revient toujours à Cette fille, véritable fil rouge du spectacle. L’écriture est subtile et soignée, mais il se permet de nombreux écarts d’improvisations très drôles.

Les sentiments

À travers Cette fille, il traite des sentiments et de comment il faut apprendre à les dompter et à les exprimer. Je me suis beaucoup reconnu dans ce spectacle, notamment lorsqu’il parle de sa famille.

Moi aussi, je viens d’une famille où on n’exprime pas ses sentiments. Ou du moins, pas les plus profonds et intimes. Tout comme lui, je sais que ma famille m’aime profondément, mais tout comme la sienne, cet amour transparaît dans les actions du quotidien et un soutien sans faille, mais je n’ai aucun souvenir qu’il ait été verbaliser. J’ai beau me concentrer, je n’ai pas de souvenir de mes parents me disant “Je t’aime“.

Résultat, tout comme lui, j’ai hérité de cette étrange “pudeur” sur ce sentiment particulier. Je me souviens parfaitement de la première fois où j’ai dit “Je t’aime” pour la première fois à quelqu’un, en le pensant. Quand tu sens que ces trois mots prennent un autre sens. Un sens plus profond, un sens véritable, un sens vrai. Comme si le mot se révélait enfin dans son vrai sens. Celui du sentiment amoureux. Ce simple “t”, qui change complètement le sens d’un verbe.

Dire “je t’aime” en le pensant, est une épreuve. Cette première fois, je me souviens, nous étions dans le noir, au lit :

“- J’ai envie de dire un truc.
– Vas-y…
– Je n’y arrive pas.
– Dis-le.
– Je… je n’y arrive pas…”

Finalement, le mot a débordé, remontant de mon cœur à ma gorge, je garde le sentiment de l’avoir vomi. “Je t’aime”. Trois mots vertigineux. Si lourd quand on les garde au-dedans, que lorsqu’on les fait enfin sortir, on se sent si léger.

Bref : en regardant son spectacle, je me suis senti moins seul dans ce rapport étrange à l’Amour et à l’expression des sentiments.

Devenir adulte

Car il s’agit bien là du sujet du spectacle. De comment, un jeune, propulsé à 17 ans sur le devant de la scène, doit apprendre a gérer sa vie. Devenir adulte dans un cadre si particulier, assumer un travail en étant encore un enfant, s’armer contre la vie et ses aléas. Comment comprendre et gérer ses sentiments. L’importance de la famille et des amis dans ce processus, alors que c’est un cheminement que l’on doit quand même parcourir seul. Sa vision de l’enfant qui devient adule est très intéressante et plutôt juste je trouve, même si je laisse à chacun se faire son avis.

Le sujet est traité avec humour et intelligence, avec une profondeur mis au service de la forme. On suit donc ses pérégrinations, revenant toujours à Cette fille, cristallisant le passage d’enfant à adulte, avec son fameux premier baisé.

La révélation

La fin se termine sur un retournement de situation à mi-mot. Très malin, très subtil, qui conclut le spectacle sans vraiment qu’on s’y attende, de façon presque brutale. Le cerveau n’a pas le temps d’assimiler que déjà, ce sont les applaudissements, les hourras et le retour dans le monde extérieur. A-t-on bien compris ?

Peut-être.

Ou pas. Les avis sont partagés. Autour de moi, certains l’ont compris, certains ne l’ont pas du tout compris, certains doutent.

Cette simple phrase remet en perspective tout le spectacle. On comprend alors que le véritable sujet de la pièce, ce n’est pas le fait de devenir adulte, ce n’est pas sa famille, ce n’est pas le premier amour, mais bel et bien de devenir soi. De comprendre qui on est et de l’accepter.

On ne suit pas les tribulations d’un jeune homme qui raconte comment il tombe amoureux de Cette fille, mais le cheminement d’un jeune homme qui comprends qui il est.

Cette simple phrase à la fin, déplace intégralement le fond du spectacle. Cette subtile phrase qu’il coupe, qu’il ne prononce pas, presque insignifiante, est en réalité le nœud, le point central, le sujet du spectacle, sans jamais aborder le sujet. Et c’est putain de malin.

C’est avec une grande pudeur et une humilité certaine qu’il ne dit pas la chose, comme si tout ce qu’il explique avant sur son incapacité à verbaliser ses sentiments, ne concernait pas Cette fille. De plus, cette incapacité n’est pas encore totalement résolue, d’autant qu’il est encore plus difficile de s’avouer des choses à soi-même que d’avouer des choses aux autres. Il est parfois plus difficile de dire “Je m’aime” que “Je t’aime.”

En conclusion

Le spectacle est un des meilleurs que j’ai vu depuis longtemps. Le fond comme la forme sont impeccables. Dans 5 ans, Panayotis et moi aurons le même âge. D’ici là, j’espère que le rencontrer et avoir l’occasion de prendre un verre avec lui, car il m’a donné envie d’en savoir plus et de discuter avec lui. Ce qui, avons-le, est rare.

Alors, Panayotis, à bientôt.

Jean-Côme

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