Mon marque-page est ma carte visite.
Littéralement je veux dire. Ma carte de visite de graphiste directeur artistique me suit partout, logé dans mon livre du moment.
Je fais ça depuis des années.
Coincé être les pages, elle indique fièrement qui je suis. C’est un peu comme si ma vie était coincée dans les histoires des autres. Jean-Côme Cabanne, Directeur Artistique, aplatit dans une étroite étreinte, tantôt avec Aliénor d’Aquitaine, tantôt avec Otori Takeo, tantôt avec Lastyanax. Mon marque-page est plus versatile que moi finalement.
Je me demande toujours ce qui se passerait si je le perdais. Est-ce que quelqu’un le ramasserait ? Serait-il piétiné ? Quelqu’un aurait-il la curiosité d’aller voir mon site internet jeancome.com ? M’enverrait-il ou elle un mail en me disant qu’il ou elle avait ramassé ma carte de visite ? Le mail serait-il signé “l’inconnu(e) du métro” ? Est-ce que quelqu’un de plus téméraire m’appellerait carrément ?
“Bonjour, je… je vous appelle car j’ai ramassé votre carte de visite. Je… je voulais vous dire que je vous trouvais très beau… oui je vous ai vu. Je l’ai vu tomber de votre livre… vous aviez l’air si absorbé par votre lecture que je n’ai pas osé vous déranger. Je l’ai ramassé juste après que vous êtes descendu. J’étais curieux. Désolé, c’est sans doute déplacé…“
On irait alors boire un verre, on rirait de ma maladroiterie (oui, c’est un néologisme volontaire), j’expliquerais de mon travail de DA, on parlerait littérature, cinéma et voyage, on passerait du café à la bière, de l’après-midi à la nuit, d’inconnus à mariés…
Il y a peu de chance. La vie n’est pas une comédie romantique, ni une publicité.
Mais ne sait-on jamais.
Pour l’instant, je ne l’ai fait tomber que 4 fois en 6 ans. Toujours, quelqu’un me le fit remarquer dans l’instant et je le ramassai en le ou la remerciant. Ce n’est pas demain que j’aurai un mail amusant ou un coup de téléphone amouraché.
En attendant, j’utilise toujours ma carte de visite comme marque-page.
Sait-on jamais.