Art/Graphic Director, touche-à-tout passionné par la communication et de la création graphique sous toutes ses formes, je m'installe à Paris en 2009. Je travaille dans les univers de la beauté (cosmétique, parfumerie, bijouterie), mais pas que… Art/Graphic Director, je réalise pour des particuliers et des entreprises des identités visuelles, des éléments de communication, des photoshoot et du conseil avec leur déploiement à 360°. Parallèlement à ça, j'occupe mon temps entre la peinture, l'écriture et surtout la photographie.

Email Us: -
Call Us: -
couv-homosexualité dans la pub

Fox News l’a clamé haut et fort : M&M’s fait d wokisme éhonté. Une cacahuète chocolatée lesbienne, une autre enrobée, plus de talons hauts… mais où va le monde ?? La marque est accusée de “politiser” ses mascottes créées en 1971. Le but de la marque avec la création de ses nouvelles mascottes, c’est de “représenter l’acceptation et l’inclusion”, notamment en soutien à la communauté LGBTQIA+, souvent le cœur exutoire des crispations sociales.

La publicité est-elle politique ?
Elle reflète fréquemment les avancées sociales, se faisant parfois militante. Qu’en est-il de la place de la représentation homosexuelle dans la publicité ? Petit tour d’horizon.

Avant 1980 : homoérotisme caché

Petit rappel historique, l’homosexualité est considérée comme une maladie, il faudra attendre 1990 pour que l’O.M.S. le retire de la liste des maladies mentales. Mais la publicité l’avait déjà accepté et cherchez à communiquer auprès de cette cible dès les années 1917, participant à la représentation de la communauté LGBTQIA+ dans l’espace publique. Mais ces publicités doivent avancer masquées.

Ainsi, en 1917 et 1919, on retrouve notamment les publicités pour le savon Ivory Soap parut dans le National Geographics, réalisé par le célèbre illustrateur J.-C. Leyendecker. Jamais marié mais “colocataire” de nombreuses années avec Charles Beach, son esthétique homoérotique a marqué l’histoire.

En 1943, retour sur l’imagerie du militaire, dans une ambiance moite et de franche camaraderie très dénudé.

En 1920 puis en 1950, ce sont des soirées pyjama entre hommes qui sont joue l’ambiguïté. Car oui, quoi de plus naturelle que de traîner entre homme en pyjama de soie dans les années 20 et 50 ?

Mais certains publicitaires osent dès les années 30 est plus explicite avec Arrow Underwear, jouant sur l’ambiguïté du mot gais/gays.
« Et maintenant, les caleçons à l’entrejambe sans couture deviennent gays. Mais pas trop gays ».
Alors oui, l’usage du mot gay pour qualifier les homosexuelles ne devient courant que dans les années 60, accentué durant les célèbres émeutes de Stonewall. Néanmoins, l’anglais utilisait le mot français de gais (devenu gays en traversant la manche) pour qualifier les homosexuelles (et les gens flamboyant de petites vertus au comportement “immoral” de manière générale) dès le XVIIe siècle.

Dans la même veine, les années 50 continuent de distiller l’imagerie homosexuelle à peine voilée. Par exemple cette publicité pour de la laine où un bouffon (déjà symbole gay, dont on garde encore l’appellation de “folle”, en vieux français fou se disant fol, de part sa place à part dans la société et son rôle perturbateur de la cour) qui explique :
« J’ai volé l’arc-en-ciel pour te rendre gaie ».
Encore une utilisation ambigue du symbole de l’arc-en-ciel et du double sens de gay. Une fois de plus, rappelons que cela peut sembler anachronique car gay pour homosexuelle n’est toujours pas popularisé, et que l’arc-en-ciel deviendra le drapeau LGBTQIA+ (ce soir le sujet d’un prochain article) qu’en 1978. En réalité, la publicité a participé à l’élaboration de cette imagerie symbolique.

Dans les années 40 et 60, les lesbiennes ne sont pas en reste. Quoi de mieux que de courir main dans la main avec son amie, en maillot de bain, après avoir passé une bonne nuit ensemble sur un matelas confortable ? Et comme le dit 7up à propos de cette jeune fille timide : « Soif de passer à l’acte ? »

Les années 40 et 60 sont aussi pleines d’ambiguïté dans les publicités pour l’alcool. Particulièrement cette publicité où deux hommes préfèrent s’isoler de leurs femmes avec cette légende :
« J’étais curieux… Je l’ai testé… Maintenant, je sais ce que Schlitz est… la bière qui rend Milwaukee célèbre !»
Si vous avez regardé la série Netflix sur Jeffrey Dahmer, vous n’êtes pas sans savoir que Milwaukee est un haut lieu de la communauté LGBTQIA+ avec des bars dédiés dès 1981 avec le fameux Club 219 de la série. Est-ce vraiment, donc, la bière qui a attiré ces deux hommes à Milwaukee ?

L’alcool toujours, avec le whisky Kinsey en 1948 et ces hommes tranquilles autour de la piscine. Hasard ? Cette même année, le rapport Kinsey classifie le comportement sexuel de l’homme de 0 (hétérosexuel) à 6 (homosexuel). La marque homonyme apporte discrètement son soutien…
En 1958, c’est Smirnoff qui joue l’ambiguïté à peine dissimulée avec sa campagne, jouant cette fois, non pas avec le double sens de gaie-gay, mais avec celui de straight, signifiant sec, mais aussi hétérosexuel. “Mixed” prenant le sens de bisexuel.

Les années 80-90, les années SIDA

Sombre époque que celle-ci. La publicité prend les armes contre la maladie. En France, c’est le baiser de Clémentine Célarié à une personne atteinte du SIDA qui marqua l’histoire de la prévention sur la contamination. Aux USA c’est cette campagne publicitaire qui fit date en 1989, réalisé par le collectif Gran Fury (dont Act Up). Elle montre que le SIDA ne se transmet pas un simple baiser, mettant en scène des couples hétérosexuel, gay et lesbienne, mais aussi avec de différentes ethnies.

Plus choc, la campagne Benetton (USA) en 1992, montrant une photographie de David Kirby, jeune homme décédant du SIDA entouré de sa famille. Le contraste de poids, l’aspect christique, tout dans cette photo choquera et fera date dans l’histoire de la publicité-vérité.

C’est également, très vite, l’apparition des premières publicités pour les préservatifs. La publicité servait à montrer que oui, la capote est sexy, que l’utiliser n’enlève pas le plaisir ni le sex-appeal.

Les années 90-2000, sans trop de vagues

Dans ces années plus apaisé, homoérotisme et représentations homosexuelles en tout genre sont plutôt accepté. Benetton évidemment mais aussi les sous-vêtements comme Calvin Klein et Abercombie participe à sexualiser le corps de l’homme et les rapports entre eux.

Une que j’adore de cette époque, c’est la publicité de 1995 de Guinness, montrant explicitement un couple homosexuel. Une vraie petite révolution.

En France, on se souvient de cette publicité Minute Maid de 2000 surfant sur la vague Village People :


Il en va de même pour Audi en 2003 :

SFR joue la carte gay dès 2005 :

De mauvais goût, les clichés de l’homosexualité sont aussi exploités, notamment par Axe, une marque connue pour sa misogynie publicitaire :

Les années 2000-2010, dans la norme

Car oui, après les années 2000, l’homosexualité dans la publicité, toujours en avance sur la société, représente de plus en plus de couple homosexuel hétéronormé, dans des situations de la vie de tous les jours.

La télévision emboîte le pas avec Dolce & Gabbana, Mc Donald, Desigual ou encore Oasis dans sa saga ultra cringe des annimaux :




Après les années 2010 : la crispation

À partir des années 2010, l’homosexualité est visible, mais la communauté commence à réclamer à avoir les mêmes droits que le reste de la population. C’est en 2012 que commence la Manif Pour Tous en France. Le reste de l’occident va dans le même sens, provoquant une crispation d’une frange de la population. La publicité se range dès le début du côté de la communauté LGBTQIA+ mais se trouve être de plus en plus critiquée.
La SPA et Thalys par exemple, sortent ces campagnes en plein durant les manifestations :


Mais face aux critiques, les marques cèdent de plus en plus. En 2019 en Hongrie, Coca-Cola par exemple décide de retirer ses publicités représentant des couples homosexuelles. La marque ni cependant, annonçant que la campagne n’a pas été “retirée” mais qu’elle était arrivée son terme… vrai ou faux ?


Il est vrai que la marque est connue pour ses positions très progressistes soutenant par exemple les droits des femmes. Elle sortira par exemple cette campagne, quelques mois après que les femmes d’Arabie Saoudite ont obtenu le droit de conduire :

Mais je m’éloigne du sujet. Sur notre sujet, c’est évidement cette publicité qui nous vient à l’esprit :

Sans oublier la campagne des 100 ans :

Conclusion

La publicité a toujours étant en phase voir en avance sur la société, accompagnant et participant à la visibilité des minorités ethniques et sexuelles. Dès le début, l’homoérotisme était présent. Cela ne posait aucun problème, tout comme l’homosexualité dans notre société, tant qu’ils restaient des dans leur coin. On regardait ces publicités sous cape, avec un petit œil grivois.
Les tensions ont commencé à apparaître récemment, lorsque les homosexuelles ont voulu être des citoyens à part entière avec les mêmes droits.

Si pendant un temps, les marques ont mené le combat du côté des revendications, elles sont néanmoins de plus en plus frileuses. Leur spécialité : les campagnes exclusivement numériques visibles sur leurs réseaux sociaux, espérant pouvoir cibler la communauté LGBTQIA+ sans se prendre les foudres des intégristes.

À notre époque où ces réseaux et la presse ont un poids de plus en plus lourd, où une minorité peut faire plus de bruit qu’une majorité, les marques ont tendance à oublier leur propre pouvoir. C’est pourquoi des marques comme Coca Cola, McDonald ou M&M’s n’hésitent plus à reculer face aux critiques d’un petit groupe. Il serait bon que les marques se souviennent que leur chiffre d’affaires ne dépendent pas de ces petits groupes. Combien d’homophobes américains seraient à réellement arrêter le Coca Cola ou les M&M’s ? Fort peu. Et quand bien même, quelle perte, au niveau mondial, l’arrêt de la consommation des homophobes provoquerait comme perte ? Sans doute infinitésimale. Alors pourquoi cèdent-elles de plus en plus ? La simple peur de la mauvaise com’. Celle-ci gonflé artificiellement par la presse intégriste et les réseaux sociaux et leur pouvoir de nuisance.
Il serait bon de retrouver des marques engagées qui pourrait sortir les muscles et monter au créneau contre ses populations minoritaires, afin de redonner à l’espace publique un souffle de liberté et de progressisme.

Mais, mon petit doigt me dit, que M&M’s n’a pas dit son dernier mot, et que ce retrait est en réalité un moyen de revenir plus fort avec un coup médiatique… à voir…

Jean-Côme

Leave A Reply